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Rendez- vous en terre inconnue à la rencontre des Oroqen « Peuple des montagnes éleveur de rennes » dans ce flamboyant album jeunesse en lice pour le prix Maya 2025. Au beau milieu d’une forêt primaire du Nord de la Chine entre les massifs du Grand et du Petit Khingan à la lisière de la Mongolie et de la Russie, la nature est nourricière, abondante et foisonnante : il importe donc d’en prélever le strict nécessaire avec respect et gratitude. Animaux et humains tous logés à la même enseigne appartiennent à la Terre-Mère
La talentueuse dessinatrice chinoise Jiu Er associée à Blackrane – écrivain renommé dans la littérature animalière – ont puisé l’inspiration dans ces territoires naturels pour nous raconter avec panache l’histoire de la petite Aya qui ne rêve que d’une chose : voir un ours ! Les autres habitants de la forêt elle les connaît bien mais le plantigrade, c’est une autre affaire. Il manque à son palmarès.
L’espace d’une journée le grand-père et la petite fille enfourchent leurs montures traversant de grandioses paysages magnifiés par des illustrations chatoyantes. Les textes en petits caractères laissent la part belle à l’immensité des espaces. C’est la fin de l’été et les couleurs éclatent comme des bonbons en bouche. En cheminant à leurs côtés, nous sommes témoins d’une nature sauvage intacte regorgeant de vie. Néanmoins fragile, il importe de la préserver en adoptant les bons gestes et une conscience aiguisée de notre environnement.
C’est avant tout une histoire de transmission que l’on nous raconte.
Il faut être discret et sur son petit cheval Aya, l’amie de la forêt, s’y sent de plus en plus chez elle. Le spectacle est partout : des oiseaux migrateurs en plein vol, une famille de lièvres les 4 pattes en l’air sous le soleil, des chevreuils avec leurs miroirs blancs au derrière, un hibou grand-duc planant et impérial, une famille renards à la couleur feu, un ballet de libellules sur l’eau, des élans cachés dans les bouquets de fleurs rouge vif : tous observent, en restant à portée de vue des humains. Les animaux ont leur raison pour ne pas trop s’approcher de nous : respectons cette distance non de sécurité, mais de respect.
A l’orée d’une pinède dégagée, l’affût pour voir le prédateur peut commencer « Enfin, comme une naissance soudaine et miraculeuse, une ombre sombre apparaît () Pour la première fois, Aya voit de vrais ours. Dans la grande forêt du Nord, les ours sont l’incarnation de la puissance. Ils sont imbattables. » Une mère et ses 3 petits batifolent sur un tas d’ordures laissé par les humains. Les détritus seront brûlés par un grand-père soucieux de transmettre les bonnes valeurs à sa petite fille. Il est essentiel que l’ours ne s’habitue pas à l’homme et à son odeur. C’est mieux pour tout le monde. Chez les Oroqen, on respecte et on se tient à l’écart des bêtes.
Le catalogue des éditions RUE DU MONDE propose des lectures qui interrogent et imaginent le monde. Cette immersion dans le quotidien d’une famille nomade vivant de la chasse , de la pêche, du troc et du travail du cuir, est une invitation dépaysante et lumineuse au voyage. Selon la légende une femelle ourse – totem tribal des Oroqen – aurait donné naissance à l’ancêtre de ce peuple animiste.
Ce conte pour enfants raconte l’histoire de deux peuples : l’un est animal et l’autre humain. Les deux se partageant le même territoire doivent apprendre les codes d’une cohabitation respectueuse et harmonieuse et c’est bien ce sentiment de sérénité qui se dégage de la lecture. Transmettre les bonnes valeurs aux plus jeunes est le seul terreau fertile qui vaille pour faire pousser de futures graines d’éclaireurs et de passeurs.
En s’inspirant des croyances des peuples racine, maintenons l’équilibre de la biosphère vital à notre survie et abandonnons notre arrogance qui nous éloigne de la vérité.