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(extrait interview octobre 2015)

Journaliste Sciences et Vie : Les singes sont donc un trait d’union entre nous et le reste du vivant ?

Frans de Waal : Bien entendu. Je pense même que la vision d’un homme complètement séparé de la nature, qui a longtemps dominé la civilisation occidentale, s’explique en partie par le fait que nous n’avons été que très tardivement en contact avec les singes. Les grandes religions monothéistes sont nées dans le désert, au contact d’animaux comme les chèvres, les chameaux, les serpents, les scorpions… Même le folklore européen, tel qu’on le voit par exemple dans l’œuvre de Jean de La Fontaine, met en scène des renards, des oiseaux, des ours, mais très rarement des singes. Lorsqu’au début du siècle les premiers singes hominoïdes ont été montrés dans les zoos de Londres et de Paris, cela a provoqué un véritable choc ; la reine Victoria avait même publiquement exprimé son malaise face à ces animaux si humains. Et cette absence d’exposition aux primates explique aussi les résistances de notre civilisation à la notion d’évolution.

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